18 km - lundi 21 septembre
2015
Le parcours nous mène sur la
Strada Alta qui longe le versant de la rive gauche du Ticino d’où le
panorama sur la Léventina et les hauts sommets est superbe. Rencontre de villages typiques
et des premiers châtaigniers. Traversée d’une surprenante forêt.
Ce matin, le car postal de la
première heure nous a amenés d’Andermatt à Airolo. Les passagers ce lundi
matin : une poignée de pendulaires pour le Tessin. Au sommet, quelqu’un est
sorti à l’arrêt de l’hospice. Peu de trafic en ce début de matinée. La vue
était magnifique dans la lumière du matin. Dans les virages masqués a retenti le
klaxon du postillon. Nous avons vu au loin la fameuse route de la Tremola
foulée la veille. A l’entrée d’Airolo, bienveillant, le chauffeur du car nous a
déposé à l’endroit où débute il camino.
La montée débute au village de
Valle vers celui de Brugnasco sur des chemins forestiers étroits, puis sur la
route asphaltée. Avec un groupe de quatre marcheurs alémaniques, nous jouons à
nous dépasser. Peu avant Brugnasco que nous est-il permis de voir ? Nous
n’en croyons pas nos yeux. Un immense camion de la voirie, occupant la largeur
de la chaussée, nettoie. La petite route de montagne à 1400m n’est vraiment pas
sale. L’affreux engin envoie sans vergogne ses gaz dans ce paysage idyllique. Nous
le dépassons puis le laissons filer, le temps de boire un café sur une terrasse
au centre de Brugnasco. Vue superbe sur la Léventine à cet endroit. Soudain, oh
surprise ! les alémaniques perdus et retrouvés sont arrivés jusque là. Peu
après, le camion de la voirie passe, qui retourne vers la vallée. Ouf !
Nous voilà repartis sur la
Strada Alta, jadis route de passage des muletiers
évitant les crues de la vallée. Prochain
village à atteindre : Altanca. Nous y amène une petite route en pente
douce et boisée. Le sky line des hauts sommets de la rive à notre droite se dessine à
travers les branchages. La route passe à la hauteur de la station intermédiaire
du funiculaire Ritom (un des plus longs au monde) puis file vers le village, échelonnée en bordure de forêt par des
bancs publics, cadeaux des notables d’Altanca. On peut lire gravé entre
autres « Mottini », nom qui
apparaît aussi sur la plupart des tombes au cimetière du hameau. L’église des
saints Cornelio et Cipriano resplendit de sa blancheur dans le soleil sur son
rocher. Sa façade d’entrée présente une fresque signée … Mottini !
Au centre du village, des
jeunes gens déchargent du bois d’un pick up. « Legno per l’hiverno ? » « Si » répond l’un d’eux, un peu
sombre sans envie d’en dire plus. Autant dire qu’il n’a pas le cœur à
l’ouvrage. Dans la vallée juste en contrebas, on aperçoit les localités de Ambri
et de Piotta. On distingue aussi, à Quinto, une imposante construction plate et
rouge, la station-service, de l’architecte Mario Botta réalisée entre 1993 et 1998.
![]() |
L'église d'Atlanca |
Autres villages pittoresques:
Ronco, Deggio. C’est plutôt mort. Bien des habitations sont passées au statut
de résidences secondaires. Signalé rouge-blanc, le sentier reprend dans la
forêt, chevauchant les ruisseaux, nous
obligeant à monter et descendre sans cesse à travers des ravins. Mais le plus
difficile est à venir: la descente dans le bois d’Öss !
Réserve naturelle protégée nous
indique un panneau. Le Bosco d’Öss s’étend de Ilanz (Grisons) jusqu’au
massif du Gothard. Dans un enfoncement du versant, tout en descente, on se retrouve
dans la tranquillité d’une nature préservée, non maîtrisée … peut-être le
secret de la création. Nul trace de sentier parmi les broussailles, racines,
rochers, cailloux dégoulinants d’eau non canalisée. Attention la
glissade ! quelques indications
subsistent, marquées rouge-blanc sur des troncs d’arbres … à ne pas manquer, sans
quoi on se perdrait définitivement. La concentration est prioritaire à chaque
pas. Cela devient périlleux pour Jon surtout pris d’une réelle fatigue. Depuis
Porrentruy, il a enchaîné 22 étapes à ce jour. On comprend son découragement.
Soudain … pas vrai ! A en
rester bouche bée : un randonneur, à peine le temps d’un salut, nous
dépasse à l’allure d’un chamois apeuré. Incroyable dans cette dénivellation, quel
pep ! Il faut dire qu’il est plus jeune que nous ! Tout ça n’est pas
pour nous encourager.
Notre réconfort tient
dans l’éclairage de fin d’après-midi. A
travers les feuillages, faisceaux de lumières sur les parterres de fougères
jouent de la brillance des eaux ruisselantes. Magique !
La longue descente nous offre -
on devait s’y attendre - une montée non
négligeable sur une petite route asphaltée accédant à Osco, terme de notre 24ème étape. Un contrefort montagneux protège le
village du bruit incessant de l’autoroute s’élevant de la vallée. Arrivée,
après 6h30 de marche, à l’auberge face à l’église, unique établissement hôtelier ouvert à cette saison. Auprès de la fontaine roucoulante, baignée de lumière, enfin
le moment de trêve et la panachée à boire à pleines gorgées ! Deux enfants jouent à
cache-cache autour d’un pâté de maisons. Leurs cris , leurs rires nous
chauffent le cœur, comme le soleil nos peaux. On se croirait en Basse Engadine, à
Ramosch devant la maison des grands-parents maternels de Jon. Bien des
similitudes !
Menu du soir. Simple et répondant
à notre grand appétit : pasta al pomodoro, purée de patates avec ragoût de
bœuf, petits pois, arrosé de rouge, une crème au dessert. Un couple d'alémaniques - rares randonneurs – s’installent à la table voisine. A
celle du stamm : des hommes du village venus prendre un verre, bavardent
un œil au Corriere del Ticino,
l’autre au téléviseur.
Le confort se résume au plus
strict. Sanitaires au palier, douche froide. Les conversations au café prennent
vite fin heureusement, car à l’étage de la chambre, on entend tout. Nous dormons
comme des loirs sous de volumineux duvets. Les nuits sont devenues plus
fraîches. Il a neigé sur les hauts sommets.
Les confitures maison du petit
déjeuner évoquent à elles seules l’atmosphère conviviale du lieu. Au Tessin, on
nous servira impérativement le café Chicco d’Oro.
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